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Nucléaire 1 – Philosophie et politique
Ce qui se déroule au Japon nous inquiète. Comment ne pas être sensible à un tel désastre ?
Les médias dont la raison d’être est essentiellement la diffusion des catastrophes, se trouvent amenés, devant la prolifération des malheurs qui frappent l’humanité, à s’attarder sur ce qui est sensé être le plus éprouvant mais aussi ce qui doit faire le plus d’audience ou de lecture. Cela peut se comprendre devant l’émotion suscitée parmi nos concitoyens compte tenu des similitudes de niveau de vie que nous pouvons avoir avec le Japon.
Cependant il faudrait discerner les catastrophes naturelles qui frappent l’humanité tout entière de celles dues à l’intervention des hommes. Souvent ces dernières frappent à cause de l’incapacité à maitriser les rapports économiques et sociaux. Cela dit il serait vain de croire que même naturelles les catastrophes n’ont pas d’effet sélectif. Généralement les plus grandes et nombreuses victimes sont les plus pauvres. Le Pakistan, Haïti, Sumatra, et bien d’autres, s’il fallait le rappeler, en apportent la démonstration et ne se sont pas encore remis des tremblements de terre, de leurs conséquenses et n’ont guère la possibilité de s’en prémunir.
Donc toujours est présente la notion d’injustice y compris dans des phénomènes qui paraissent ne concerner que l’humanité en général confrontée à la transformation de la nature au profit de sa survie. Il est bien évident que le débat sur l’énergie nucléaire nous le rappelle dans la mesure où pour faire face à ses besoins un peuple, cependant très évolué sur le plan technologique, n’a eu d’autre choix que de recourir à cette énergie de part sa position géographique.
Les uns prétendent qu’il faut arrêter cette production d’énergie tout en concédant que le recours aux nouvelles ne peut à très long terme s’y substituer, les autres qu’il faut, moyennant des précautions, y recourir car du point de vue du risque (pollution de l’atmosphère par le CO2 notamment, risques de mortalité, etc) elle n’est pas plus nuisible et même moins. En ce domaine, et il n’est pas le seul, il y a toujours les extrêmes qui radicalisent dans un sens ou dans l’autre.
Il me semble que l’arbitrage entre ces deux positions appelle avant tout une réflexion d’ordre philosophique et politique. La seconde complétant la première. Je m’excuse par avance de cette simplification qui va probablement faire sourire.
La réflexion philosophique consiste à tenter d’éclairicir le rapport et le fondement de la relation entre les humains et la nature et les droits et les devoirs de ceux-ci à son égard. Ce qui a permis à l’espèce humaine d’émerger et d’établir une relative domination et transformation de la nature est sa capacité à la découverte et à la création d’outil dans ce qui est une dominante de son existence : le travail. Mais le travail, immensément utile à l’évolution de l’espèce, a eu un des effets évidemment pervers souvent liés à la richesse qu’il a permis de cumuler et dont l’appropriation et l’usage ont conduit à créer des différences injustifiées entre les catégories d’individus et à dévier ainsi d’un rapport écologique avec la nature.
La première pierre taillée probablement destinée à tuer l’animal convoité pour se nourrir a été aussi une arme pour se protéger de l’agression ou pour agresser ses semblables. Il en a été ainsi après la découverte atomique, comme il en fut certainement de même pour toutes les découvertes au fil des âges.
Mais comment en aurait-il pu en être autrement pour une espèce divisée dans son évolution sociale en clans, en tribus, en nations toujours hierarchisés, classés dans des rapports d’exploitation ou le combat pour domestiquer la nature a été doublé de celui pour s’affirmer et dominer l’autre ?
Chaque découverte scientifique, technologique, ne peut échapper aux conséquences de rapports sociaux conflictuels entre classes, entre nations. Il faut donc des réponses politiques qui intégrent la transformation des rapports humains à l’échelle planétaire.. Mais une réponse politique n’ignorant pas une vision correcte sur le plan philosophique, c’est à dire situant notre espèce dans la nature dont il n’a pas à se détacher.
Le nucléaire entre bien dans cette action, propre à notre espèce, de transformation de la nature. Mais évidemment le pire est à craindre si on le développe en ne tenant pas compte des dangers que présente l’évolution quasi inéluctable de cette nature et les rapports conflictuels qu’entretiennent les hommes entre eux.
Cela signifie qu’il ne faut pas construire de centrales nucléaires partout ou l’on n’est pas à l’abri de protection sûre et réelle des cataclysmes naturels et de conflits militaires. La maitrise scientifique et technique étant indispensable.
Les deux conditions ne sont pas remplies pour la plupart des nations concernées par l’utilisation de cette énergie. Il ne faut donc pas aggraver la situation mais en même temps oeuvrer pour que le nucléaire devienne affaire de gouvernance mondiale et pour le moins soit conçu et réalisé dans la plus large concertation internationale pour des objectifs pacifiques. Tout arrêter parce qu’on n’en est pas là ? Il n’y a que les opportunistes et les irréalistes pour le demander !
Ne peut-on réver aux lendemains qui chantent pour le confort des êtres humains même si la partition est encore incomplète. Cela vaut pour une politique énergétique comme pour la politique en général. Sans cela pas d’âge de pierre, ni de fer, ni de bronze mais une planète sinistre, aussi sinistre et difficile à vivre pour l’homme que sont les déserts de sable ou de glace ou les jungles inhospitalières.
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