Pas cinquante solution après le départ d’Henri IV : un gouvernement de toute la gauche sans exception plus ceux qui veulent développer une politique basée sur la demande du peuple et non sur l’offre des grands patrons !
Posté par jacques LAUPIES le 5 septembre 2025
LU DANS L’HUMA
Budget 2026 : dans la cacophonie, comment la gauche espère capitaliser sur la chute de Bayrou
Le départ annoncé du premier ministre ouvre un chemin pour le NFP qui pourrait à nouveau faire savoir son envie de gouverner et incarner la rupture avec le macronisme. Ses divisions pourraient cependant menacer sa marche commune en cas de dissolution.
© Lionel Préau
Si l’on en croit les réseaux sociaux, le lundi 8 septembre sera un jour de fête. Dans de nombreux départements, ont fleuri des appels à célébrer sur le parvis des mairies le « pot de départ » de François Bayrou, qui, sauf miracle, devrait ce jour-là perdre à l’Assemblée son vote de confiance et quitter Matignon.
Une manière festive de respirer, après la chute d’un premier ministre qui promettait l’austérité et la suppression de deux jours fériés aux Français, à l’initiative de collectifs de gauche comme Attac ou de groupes préparant la mobilisation « Bloquons tout » du 10 septembre.
La gauche fait la fête, donc, mais après ? Peut-elle à nouveau chercher à s’imposer au gouvernement, après cette rentrée politico-sociale explosive qui devrait, selon toute probabilité, mettre à l’agenda ses thèmes de prédilection – justice sociale, impôts sur les grandes fortunes, hausse des salaires, défense des services publics ?
Il y a un an, les forces du Nouveau Front populaire (NFP), arrivées en tête des législatives, s’étaient mises d’accord, non sans tergiverser, sur le nom de Lucie Castets comme première ministre. La gauche entendait gouverner sur la base du programme du NFP. Douze mois plus tard, la haute fonctionnaire n’est plus une option pour incarner l’union au sommet de l’État et la cacophonie a repris ses droits.
Les socialistes et Glucksmann ne veulent plus de LFI
La question d’un gouvernement NFP est enterrée. Chacun y va de sa stratégie. Les socialistes ont été les premiers à se dire « prêts » à gouverner – en admettant qu’Emmanuel Macron ne nomme pas à nouveau quelqu’un de son camp en dépit du résultat des urnes et du rapport de force dans l’Hémicycle.
En guise de lettre de motivation, le parti à la rose a présenté son propre budget, « une base de négociation », selon les mots du président des députés PS, Boris Vallaud, pour discuter à la fois avec le reste de la gauche et le bloc présidentiel, auquel il entend faire renoncer (en partie) à la politique de l’offre avec 26 milliards d’euros de nouvelles recettes et un plan d’investissements de 10 milliards d’euros. Problème : cette offre de service s’est faite sans l’assentiment des éventuels partenaires écologistes ou communistes, et elle exclut d’office LFI, avec qui les socialistes veulent rompre.
Une ligne partagée par Raphaël Glucksmann, numéro un de Place publique, proche du PS et potentiel candidat à la présidentielle : « La gauche est légitime à gouverner, à condition de se placer dans une perspective de compromis et de négociation sur le budget avec les autres forces du front républicain », assure l’eurodéputé. Lui assume frontalement son hostilité envers LFI : « Qui peut imaginer que nous gouvernions avec Jean-Luc Mélenchon, Louis Boyard et Mathilde Panot ? » ironise-t-il dans Libération.
Les écologistes ont eux présenté leur plan de « sortie de crise », ce jeudi 4 septembre, assorti d’une réunion en visioconférence avec les autres partis de gauche (PCF, PS, Génération.s, Debout… en présence de Lucie Castets) pour évaluer les « convergences programmatiques en cas de cohabitation ». Les Verts se gardent toutefois d’appuyer la démarche du PS et laissent la porte ouverte à LFI, qui a refusé de participer à ladite réunion. Marine Tondelier, qui vise une candidature commune y compris en 2027, reste attachée au NFP, bien que certains dans son parti, tel l’eurodéputé David Cormand, estiment « que seul un accord entre le bloc dit central et la gauche permettra d’obtenir une majorité ». Une telle option reviendrait de facto à la rupture avec LFI.
« Nous aurons le devoir de nous offusquer si Macron ne choisit pas un premier ministre issu de notre camp », préfère avertir la secrétaire nationale des Verts, qui met sur la table 25 milliards de nouvelles recettes avec la taxe Zucman, une contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises et une taxe sur le kérosène. Le tout doit permettre de débloquer 6,1 milliards pour financer les services publics. « Ce n’est pas un renoncement au programme du NFP », coupe d’emblée l’écologiste, qui propose de renoncer à l’article 49.3 en gage de bonne volonté.
« On ne peut pas faire d’exclusive à gauche »
Les communistes, eux, ont été reçus lundi à Matignon, où ils ont défendu leur pacte national pour la France : un plan de relance à 500 milliards d’euros sur cinq ans, assorti entre autres de la nationalisation de certaines banques. Interrogé par l’Humanité, le président du groupe communiste, Stéphane Peu, critique l’hypothèse d’un gouvernement PS sans LFI : « Ce n’est pas praticable. On ne peut pas faire d’exclusive à gauche. Ni les socialistes à l’égard des insoumis, ni l’inverse. La gauche s’abîme dans des divisions inutiles alors que le pays est menacé par l’extrême droite. » « Je pense que le périmètre du NFP est le bon, assure aussi le député de Seine-Saint-Denis. Ce n’est pas anormal que chacune de ses composantes poursuive par ailleurs son travail programmatique. »
Même dans l’hypothèse la plus optimiste, du point de vue socialiste, où un gouvernement PS serait appuyé par les Verts et les communistes, celui-ci reposerait sur un bloc de 121 députés (le NFP sans les insoumis). Très fragile. Alors les socialistes espèrent arracher, en échange là aussi d’un renoncement au 49.3, un accord de non-censure avec la Macronie dans l’espoir de ne pas chuter dès les premiers jours et de glaner des victoires parlementaires : adoption de la taxe Zucman, impôt sur les grandes entreprises, hausse des salaires via la baisse de la CSG. Des réformes consensuelles à gauche et qui permettraient, selon eux, de tempérer l’ire des insoumis : « J’attends de voir s’ils tireront un trait de plume sur toutes ces avancées », confie Boris Vallaud à l’Humanité.
Mais la fracture est aussi stratégique : LFI refuse tout compromis avec le bloc présidentiel, convaincu que son électorat le vivrait comme une trahison. « Si c’est pour être la béquille du macronisme, ce sera sans nous, et même contre nous », avertit Manuel Bompard, coordinateur national de LFI. Pour lui, le PS cherche à bâtir un « accord de coalition » avec le camp présidentiel. L’insoumis ne voterait pas la confiance à un gouvernement mené par les socialistes, qu’il accuse de « déchirer le programme du NFP » en proposant de négocier sur une base déjà rabotée : « Ils ne proposent plus l’abrogation de la réforme des retraites, mais sa suspension à 63 ans, ni la hausse du Smic ! Ils nous ont déjà fait le coup la dernière fois : ils en sont ressortis avec le conclave des retraites qui n’a servi à rien. »


