Fabien Roussel
Posté par jacques LAUPIES le 20 mai 2023
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Posté par jacques LAUPIES le 19 mai 2023
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Posté par jacques LAUPIES le 15 mai 2023
28 historiennes et historiens ont accepté de participer à la réalisation d’un hors-série exceptionnel de 124 pages à l’occasion du 230 e anniversaire de l’année 1793. Pierre Serna, le directeur de l’Institut d’histoire de la Révolution française, en est le rédacteur en chef.
Lundi 15 mai 2023
Comme aime à le dire l’historien Pierre Serna, directeur de l’Institut d’histoire de la Révolution française, 1793, « l’année exceptionnelle », méritait bien un hors-série. Et qui mieux que lui justement pour en être le rédacteur en chef. Pour nous raconter cette « année à nulle autre pareille », Pierre Serna a mis à contribution 14 historiennes et 14 historiens.
Parmi eux, notre grand ami Claude Mazauric, qui, dans un dialogue stimulant, nous montre comment « 1793 est l’explosion de la créativité et de l’inventivité » et l’« émancipation de personnes de peu, comme cela ne s’était jamais vu ». La Constitution du 24 juin, la Convention, l’invention de la République sociale, la grande peur de l’an II, la guerre et la Terreur, la place des femmes… Rien de ce qui fait 1793 n’est mis sous le tapis dans ce numéro exceptionnel.
Il y est également question des acteurs de cette année 1793. À commencer par Maximilien de Robespierre lui-même. Figure charnière à propos de laquelle Jean Jaurès écrivait : « Je suis avec Robespierre, et c’est à côté de lui que je vais m’asseoir aux Jacobins. Oui, je suis avec lui parce qu’il a à ce moment toute l’ampleur de la Révolution. »
Robespierre, que les thermidoriens ont anathématisé, associant son image à celle d’une dictature sanguinaire. L’incorruptible est depuis deux cent trente ans au cœur d’une féroce bataille historiographique et idéologique. Fabien Gay, le directeur de l’Humanité, rappelle d’ailleurs que « Robespierre, c’est ce révolutionnaire dont aucun édifice ou espace public ne porte le nom dans la capitale française, volonté délibérée de l’État de ne pas lui reconnaître un rôle prééminent dans l’histoire contemporaine et passer sous silence 1793 dans la période révolutionnaire, réduisant cette dernière à la prise de la Bastille dans l’imaginaire collectif ».
La Révolution française, ce n’est pas que 1789. Le peuple de 1793 se mêle de son destin et, peut-être pour la première fois, prend conscience de sa capacité à peser sur les choix et sur l’avenir. Les femmes et les hommes de l’an I ont gagné une légitimité qu’ils n’entendent céder à personne.
« Jamais les maux de la société ne viennent du peuple », clamait Robespierre, qui jugeait que « c’est dans la vertu et dans la souveraineté du peuple qu’il faut chercher un préservatif contre les vices et le despotisme du gouvernement ». Mais lorsque la volonté de ce peuple épouse celle de la Convention, l’impossible se produit. En 1793, rappelle Pierre Serna, « l’histoire se retourne ».
Malgré les puissances royalistes et aristocratiques coalisées de toute l’Europe, « la détermination à défendre coûte que coûte la République, la démocratie, le peuple souverain, le bonheur comme nouvelle idée, la Convention comme pouvoir des législateurs d’un monde nouveau vont, contre toute logique, l’emporter. Une leçon d’histoire à jamais s’écrit. Ce que les républicains veulent, ce que le peuple des citoyens engagés a décidé, devient possible ».
Oui, 1793 a ouvert le champ des possibles. Elle a stimulé les réflexions intellectuelles et les travaux d’historiens pour en comprendre les ressorts et les dynamiques. Elle irrigue encore le mouvement ouvrier, démocratique, républicain en France et à l’étranger. Comme l’écrit Pierre Serna : « 1793 n’est pas notre passé ; n’en déplaise aux réactionnaires de tout poil et de tous pays, 1793 est notre aujourd’hui, elle est notre futur. 1793 est notre actualité et notre lendemain. » Et, oui, nous continuons de nous asseoir aux côtés de Robespierre !
Antoine de Baecque, professeur d’histoire du cinéma à l’École normale supérieure/Ulm.
Keith Michael Baker, professeur d’histoire de l’Europe moderne, université de Stanford.
Michel Biard, professeur d’histoire du monde moderne et de la Révolution française à l’université de Rouen, ancien président de la Société des études robespierristes.
Déborah Cohen, maîtresse de conférences à l’université de Rouen-Normandie.
Régis Coursin, chercheur postdoctoral, université de Montréal.
Brigitte Dionnet, doctorante, Institut d’histoire de la Révolution française (IHRF)/Institut d’histoire moderne et contemporaine (IHMC).
Mathieu Ferradou, maître de conférences à l’université Paris Nanterre.
Bernard Gainot, maître de conférences HDR honoraire, université Paris-I Panthéon-Sorbonne.
Dominique Godineau, professeure d’histoire moderne, université Rennes-II/Tempora, directrice des Annales historiques de la Révolution française, présidente de la Société des études robespierristes.
François Huzar, chercheur associé à l’Institut de recherche sur le cinéma et l’audiovisuel.
Anne Jollet, maîtresse de conférences en histoire moderne à l’université de Poitiers, rédactrice en chef des Cahiers d’histoire.
Hervé Leuwers, professeur à l’université de Lille, ancien président de la Société des études robespierristes.
Marisa Linton, professeure émérite à l’université Kingston.
Jean-Clément Martin, professeur émérite à l’université de Paris-I Panthéon-Sorbonne, ancien directeur de l’Institut d’histoire de la Révolution française.
Laura Mason, professeure d’histoire à l’université Johns Hopkins.
Anne de Mathan, professeure d’histoire moderne, université de Caen-Normandie.
Claude Mazauric, historien spécialiste de la Révolution française, ancien président de la Société des études robespierristes.
Hugo Orain, enseignant et docteur en histoire.
Élise Pavy-Guilbert, maîtresse de conférences à l’université Bordeaux-Montaigne et membre de l’Institut universitaire de France.
Johanne Perrin, agrégée d’histoire.
Christy Pichichero, professeure d’histoire à l’université George Mason.
Olivier Ritz, maître de conférences en littérature française à l’université Paris Cité.
Anne Rolland-Boulestreau, professeure d’histoire moderne, UCO, Angers.
Stéphanie Roza, chargée de recherches CNRS en philosophie politique.
Pierre Serna, professeur d’histoire de la Révolution et de l’Empire, Paris-I Panthéon-Sorbonne, IHRF-IHMC.
Caroline Seveno, maîtresse de conférences en histoire, université des Antilles.
Côme Simien, maître de conférences en histoire moderne, université Paris-I Panthéon-Sorbonne.
Anne Simonin, directrice de recherche au CNRS (Cespra-Ehess).
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Posté par jacques LAUPIES le 13 mai 2023
https://www.humanite.fr/monde/environnement/du-rwanda-la-chine-enquete-sur-l-odyssee-sanglante-de-la-fabrication-des-smartphones-794311
Cet outil indispensable dans le quotidien de milliards de personnes porte en lui l’histoire d’une surexploitation des ressources naturelles et de l’esclavage moderne. LA PREUVE.
Samedi 13 mai 2023
Qui d’autre que moi, objet symbolique de la modernité par excellence, peut se targuer d’être utilisé par 6,7 milliards d’êtres humains en 2023, soit près de 84 % de la population mondiale ? En 2025, ce chiffre devrait atteindre 7,3 milliards. Et rien qu’en France, 56 millions de citoyens me possèdent. Mais je viens de loin, de très loin. Pour me fabriquer, puis après ma courte vie, me jeter, c’est toute la planète qui est concernée. Voici mon odyssée, celle du smartphone.
C’est ici, dans les collines de l’est de la République démocratique du Congo (RDC), que débute la vie d’un smartphone. Ou plutôt celle des matières premières nécessaires à sa construction : ces fameuses « terres rares » qui, dans cette région, ne le sont pas. Notamment au Kivu, où, si le sol est fertile, le sous-sol l’est encore davantage, le plus riche au monde : la cassitérite pour l’étain, la wolframite pour le tungstène, le colombium-tantale – dit coltan – pour le tantale, le cuivre ou encore l’or s’y trouvent en abondance.
Environ 60 % de la production mondiale de cobalt, le minerai le plus demandé au monde, viennent de ces mines. Près de 80 % des réserves mondiales de coltan sont également là, ainsi que les septièmes réserves de lithium. Trois éléments essentiels à la fabrication de tous les appareils électroniques modernes, surtout pour les batteries. Quant à l’or, dont la qualité inégalable de conducteur électrique apparaît aussi dans la composition des smartphones, il est extrait dans tout l’est de la RDC, qui a produit officiellement 25 306 lingots en 2022. Mais l’orpaillage illégal sévit avec des estimations variant entre 300 kilos et… 20 tonnes par an.
Esclavage moderne. En 2018, 250 000 personnes travaillaient comme « creuseurs » pour un revenu compris entre 1 et 2 dollars par jour, parmi elles, 40 000 enfants. © Thomas Imo/Picture Alliance/Phototeck
C’est bien une odyssée sanglante que celle du smartphone. En RDC, l’industrie minière représente 22 % du PIB national, et environ un cinquième de la population congolaise vit de cette manne. Ou plutôt survit : malgré cette richesse, le PIB par habitant est l’un des cinq plus faibles au monde. Et si ces entreprises extraient 80 % des minerais du pays via de grands groupes qui encadrent – relativement – les conditions de travail, le reste se fait de façon informelle.
Dans des petites mines à ciel ouvert où, selon le chercheur Siddharth Kara, de l’université de Harvard, spécialiste de l’esclavage moderne et du travail des enfants, 250 000 personnes travaillaient en 2018 comme « creuseurs » pour un revenu compris entre 1 et 2 dollars par jour.
Parmi elles, 40 000 enfants, selon une étude publiée par Amnesty International en 2016. Parfois âgés de seulement 9 ans, souvent pour payer les frais de scolarité, ils travaillent pour extraire du cobalt « le week-end, les vacances scolaires, mais aussi avant et après leur journée d’école ». Avec de nombreux risques pour leur santé, notamment la fibrose pulmonaire, et pour leur sécurité, avec l’effondrement de puits. Le gouvernement de la RDC n’a reconnu qu’en 2017 que des enfants travaillaient dans les mines.
Le coltan, quant à lui, est à la source de conflits parmi les plus meurtriers et abjects au monde. Autour de Goma, la capitale dans le nord du Kivu, le contrôle des mines et l’extraction du minerai donnent lieu à de violents combats entre les forces armées congolaises et une centaine de milices et de groupes locaux. Le plus connu et le plus important, le M23, agit même en sous-main pour le voisin rwandais, en pillant les sous-sols congolais. Le Rwanda, qui ne possède pas une seule mine de coltan ou de tantale, est aujourd’hui respectivement le premier et le troisième exportateur mondial de ces minerais.
Si les grands constructeurs mondiaux – Apple, Samsung, Microsoft, Google –, ainsi que l’Union européenne et le Congrès états-unien, ont mis en place des mesures sur la transparence de l’origine des minerais, le bilan est loin d’être satisfaisant. Notamment car, sur place, le produit du minage illégal, à commencer par celui des enfants, est mélangé par les « maisons d’achat », souvent tenues par des entreprises chinoises, au minerai légal. Et malgré le combat des ONG et des citoyens, les informations à ce sujet sont toujours distillées au compte-gouttes.
À Taiyuan (Chine), l’immense usine de Foxconn est une ville grise dans une ville qui l’est tout autant. Bureau de police, temple, cinéma, point d’embauche, salles de sport et de restauration, festival culturel. Le tout assorti de grilles antisuicide sur les toits. Il faut dire que son patron taïwanais, Terry Gou, met le paquet pour parfaire son image d’« Henry Ford de l’Asie triomphante ». Mais, en se levant à 5 heures du matin et en achevant le travail vers 23 heures, peu d’ouvriers voient comment ils pourraient profiter de sa bonté. Alors, ils se font leurs propres films.
Favorisées par le vase clos et les conditions innommables chez ce sous-traitant d’Apple, les rumeurs les plus folles circulent dans les dortoirs. « On m’a dit qu’il était difficile de donner naissance à un garçon pour ceux de Foxconn, à cause de la pollution industrielle », racontait, en 2012, à « l’Humanité » Xiao-Ji (1), jeune « mingong » (travailleuse migrante) venue chercher dans le Shanxi le salaire qu’elle ne trouvait pas dans sa province rurale.
Comme beaucoup d’autres, elle laissait derrière elle un enfant en bas âge pour contribuer au « miracle chinois » de développement, basé sur l’exportation, et à la fortune de Foxconn et Apple. Son salaire lui permettait également de faire des transferts d’argent à ses parents pomiculteurs restés au pays.
Tout le monde sait qu’il est facile d’être embauché sur les chaînes de montage : « C’est le seul avantage quand on n’a aucun diplôme, aucune formation », lâchait alors Jin, 26 ans à l’époque. « L’entreprise nous forme en quelques jours avant de nous envoyer dans les ateliers. Là, les plus expérimentés finissent notre apprentissage », expliquait-il. Les rudiments de la sécurité ? Seuls les travailleurs semblent responsables. Près des chaînes, une affiche prévient : « La négligence est le berceau des accidents. »
Les ouvriers de Foxconn (Chine), dont le salaire s’est effondré en l’espace d’une année, se lèvent à 5 heures du matin et finissent leur besogne vers 23 heures. © Kin Cheung/AP Photo
Partout en Chine, les ouvriers de Foxconn savent ce qu’être une variable d’ajustement veut dire. En avril, l’entreprise annonçait diminuer de près de 16 % les salaires des travailleurs de Shenzhen pour atteindre entre 19 et 20 yuans l’heure (entre 2,52 et 2,65 euros). La société, qui tente de gonfler ses marges, organise également sa sortie de Chine, où elle emploie 900 000 personnes sur un total de 1 million dans le monde.
Du lundi au vendredi, l’actu essentielle décryptée par la rédaction de l’Humanité.
Dans le contexte de guerre économique et de concurrence technologique entre les États-Unis et la Chine, le groupe taïwanais pourrait être tenté de délocaliser davantage chez l’allié indien, qui fabrique déjà des iPhone depuis 2019 et tente de développer le domaine de la tech. Il faut dire que Terry Gou est admirateur de Trump et souscrit aux théories d’endiguement de la Chine.
Cette réorganisation du capitalisme sur le dos des ouvriers chinois intervient également après la révolte massive de novembre 2022 au cœur de l’usine de Zhengzhou, où sont assemblés 70 % des iPhone vendus sur la planète.
Dénonçant le confinement drastique au sein du site de production, les conditions sanitaires déplorables, le manque de repas et le non-versement de primes promises, des travailleurs avaient pris à partie des agents de sécurité et franchi les barrières sans autorisation. Pour mettre fin au soulèvement, Foxconn a versé un bonus de 10 000 yuans (1 300 euros).
Les travailleurs arrivés avant novembre 2022 s’étaient également vu attribuer un complément de 13 000 yuans (1 700 euros) en décembre et janvier. Mais 20 000 ouvriers ne sont toutefois jamais revenus. Le travail demeure éreintant et « ennuyeux », selon les dires de plusieurs travailleurs. La société pourrait bien faire face à des difficultés durables de recrutement en Chine.
Une annonce publiée le 18 avril dernier suggère que les nouvelles recrues se verront offrir une obole allant jusqu’à 2 500 yuans (331 euros). Une somme en deçà des 6 500 yuans (860 euros) proposés un an auparavant.
Ce n’est pas la première fois que ces usines sont le théâtre de mouvements sociaux et d’une répression qui mobilise parfois les policiers par milliers. Le courant des années 2010 a été émaillé de soulèvements pour dénoncer, outre les conditions de travail, le système de gestion militaire.
Élevé par un père policier, Terry Gou est persuadé que les managers ont beaucoup à apprendre de la discipline des régiments. « Les ouvriers sont traités comme de simples unités de production, (…) la violence reste parfois le seul moyen de s’exprimer », explique Geoffrey Crothall, de l’ONG China Labour Bulletin. La décennie précédente a également été marquée par des suicides en série. Ce qui n’avait pas empêché le créateur d’Apple, Steve Jobs, de trouver ces usines « plutôt chouettes ».
Le dépotoir d’Agbogbloshie, au Ghana, est considéré comme l’une des plus vastes décharges à ciel ouvert au monde. © Gioaa Forster/DPA
À quelques encablures du centre-ville d’Accra, Agbogbloshie étale ses immondices à perte de vue. C’est là, dans ce quartier périphérique de la capitale ghanéenne, que viennent mourir les déchets électroniques d’Europe et des États-Unis. Là où les eaux de la rivière Odaw ne sont plus qu’un vaste égout. Sur ce parterre de câbles enchevêtrés, d’écrans, de claviers et de petit électroménager au rebut, pourrissent des milliers de smartphones convoyés jusqu’au Ghana par des filières mafieuses.
Considérée comme l’une des plus grosses décharges à ciel ouvert au monde, Agbogbloshie est aussi l’un des dix sites les plus pollués de la planète. Pourtant, chaque jour, des heures durant, à mains nues et sans aucune protection, des centaines de « récupérateurs » triment dans ce décor cauchemardesque pour extraire de nos smartphones tout ce qui peut – encore – être revendu. Du cuivre principalement. Du fer, de l’aluminium et quelques métaux précieux aussi. Selon les ONG, plus de 40 000 personnes – dont des centaines d’enfants – survivent au Ghana de cette activité. Et, pour séparer les coques en plastique des métaux, ces forçats d’Agbogbloshie mettent le feu aux déchets. Alors, de l’immense décharge s’échappent des panaches de fumée noire, épaisse, hautement toxique. Des polymères brûlés, bourrés de plomb et de mercure, des brasiers de fortune qui exposent les populations à de très fortes chaleurs et au risque d’explosion de certains matériels informatiques.
Dans son rapport « Les enfants et les décharges numériques », publié en 2021, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) tirait la sonnette d’alarme sur ces « processus de recyclage rudimentaire (…) associés aux sites de déchets d’équipements électriques et électroniques » – les DEEE dans le jargon –, coupables de provoquer « une grave contamination environnementale et des risques pour la santé humaine ». Dans le détail, poursuivait alors l’OMS, « le démantèlement, le chauffage et le brûlage à l’air libre émettent des particules en suspension dans l’air et entraînent la lixiviation de sous-produits dans le sol et les sources d’eau », c’est-à-dire l’infiltration d’agents toxiques comme le brome, contenu dans les plastiques et classifié en tant que polluant organique persistant.
Derrière l’exposé toxicologique un brin aride se cache la réalité d’une dégradation dramatique de la santé des populations exposées, parmi lesquelles les Ghanéens d’Agbogbloshie. Car ces substances polluent tout : « L’air, la poussière, l’eau et la terre », égraine l’OMS. Pire, poursuit le rapport, non seulement « les travailleurs inhalent et ingèrent des poussières dangereuses et peuvent les ramener au sein de leur communauté, et de leur famille, par la peau, leurs chaussures et leurs vêtements », mais ces polluants se déposent également « sous forme de résidus sur les cultures, les aliments vendus sur les marchés et d’autres surfaces ». Les conséquences sont désastreuses : atteintes neurologiques, malformations congénitales, prématurités, cancers, accidents cardio-vasculaires, « dommages à l’ADN », affections respiratoires aiguës…
À en croire les projections des Nations unies, la production mondiale de déchets d’équipements électriques et électroniques devrait atteindre plus de 74 millions de tonnes à horizon 2030, contre 54 millions de tonnes recensées en 2019 (déjà en augmentation de 20 % en cinq ans). Une explosion due, principalement, à la croissance exponentielle du marché du smartphone. Or, détaille l’OMS, « seuls 17,4 % des DEEE produits en 2019 ont atteint les systèmes formels de gestion ou de recyclage », le reste ayant été « éliminé dans des décharges illégales ou recyclé par des travailleurs informels ».
Pourtant, et pour n’évoquer que l’Europe, la réglementation est stricte en la matière. Votée en 2002, une directive impose ainsi la valorisation des DEEE en instaurant le principe de la responsabilité du producteur. Deux décennies se sont depuis écoulées. Et à 7 000 kilomètres au sud de Bruxelles, dans les bidonvilles d’Accra, les exploités d’Agbogbloshie mesurent chaque jour un peu plus l’hypocrisie meurtrière des pays riches.
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Posté par jacques LAUPIES le 12 mai 2023
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