Ferrat adulé c’est bien mais Ferrat récupéré cela m’attriste
Posté par jacques LAUPIES le 28 février 2015
Bien sur je ne me permettrai pas de dire que l’hommage dont il est question ici relève de la moindre récupération. D’autant qu’il serait malvenu de douter de la sincérité de tous ceux qui se sont investis dans cet hommage et d’en juger sans les connaître vraiment !
Que Ferrat chanteur engagé devienne soudain tant honoré, enfin dès lors que sa disparition a fait que des millions de personnes lui ont manifesté leur attachement, suscite des sympathies parfois assez étrange, peut cependant nous interroger.
On l’a bien vu avec l’attentat de Charlie Hebdo, les foules émues affirmant leur émotion de manière spontanée ont, elles aussi, suscité des soutiens plutôt bizarres et déplacés.
Il en est souvent ainsi quand s’éveillant à la commémoration d’évènements, de faits de résistance, parfois même de réhabilitation de victimes d’injustices et d’erreurs judiciaires, se joignent à l’empathie générale, 50 ans après, des personnages issus de familles politiques qui durant des décades ont fait le silence sur ces évènements.
Tout cela a un nom : c’est de l’hypocrisie ! Sauf qu’il faut tout de même prendre en compte ceux qui n’ont peut être pas assimilé le véritable constat (ou message) du poète au temps où ils l’ont découvert, de son vivant. Souvent pour lui prêter ,aujourd’hui, un message conforme à leur propre évolution tout à fait contraire, à l’intention et la sensibilité de l’auteur.
Quand j’entends un « adepte » de l’extrême droite fondre d’admiration sur la chanson « Ma France » je peux comprendre qu’il soit sincère mais je me dis tout de même que sa pensée n’est pas sans contradiction et n’est pas très structurée et pour le non exempte de confusion.
On pourrait aussi considérer que l’artiste appartient à la nation et que tout le monde peut s’en réclamer. Autre forme d’hypocrisie qui pourrait laisser supposer que tout le monde a le droit de se prévaloir de Baudelaire, Rimbaud, Aragon et tant d’autres et que tout le monde a une attitude intellectuelle, commet des actes, conformes à ceux la même qu’il prétend idolâtrer.
Jean Ferrat, un hommage à plusieurs voix

Cinq ans après sa disparition le souvenir de notre ami Jean Ferrat reste toujours aussi fort. Les mots du chanteur qui nous a quittés le 13 mars 2010 manquent et sa voix chaude, son regard profond et amical restent à jamais gravés dans nos cœurs. Ferrat c’était la poésie, l’émotion, le cri et des milliers d’admirateurs de ce passeur d’une chanson libre, pudique, amoureuse de la vie comme des vers d’Aragon auxquels il aimait mêler sa plume. Jean Ferrat incarnait cette France fraternelle, toujours prête à s’engager pour un idéal commun. Il était porté par un immense public. Une foule d’anonymes émus par sa disparition qui avaient tenu à saluer sa mémoire au cimetière d’Antraigues-sur-Volane, tandis que quatre millions de téléspectateurs avaient suivi la cérémonie de ses obsèques retransmise en direct à la télévision.
Permettre à cette œuvre exceptionnelle de se poursuivre
Par bonheur, il reste les chansons du poète qui a su magnifiquement chanter l’amour, l’injustice, la France des travailleurs. Un répertoire célébré par plusieurs générations de chanteurs dont Enzo Enzo, Clarika, Jehan, Sanseverino, Allain Leprest, André Minvielle, D’de Kabal et Francesca Solleville, lors d’un spectacle particulièrement émouvant présenté par Michel Drucker, qui a toujours été très proche de Ferrat, à la Fête de l’Humanité en septembre 2010.
Aujourd’hui, le monde de la chanson lui rend hommage avec un album de reprises de ses plus belles chansons baptisé Des airs de liberté. Un projet auquel tenait Marc Lavoine, qui s’était lié d’amitié avec Jean Ferrat rencontré lors de l’émission Stars 90, qui a réussi à convaincre Gérard Meys, ami et producteur depuis ses débuts, de sortir ce disque collectif , à paraître lundi chez Sony Music.
Un album original composé d’un prestigieux casting d’artistes dont Patrick Bruel, Cali, Catherine Deneuve et Benjamin Biolay, Dionysos, Julien Doré, Patrick Fiori, Grégoire, Marc Lavoine, Patricia Petibon, Raphaël, Sanseverino, Natasha St-Pier, Hubert-Félix Thiéfaine et Zebda. Une palette d’interprètes qui permet à l’œuvre exceptionnelle de Ferrat de se poursuivre. Un répertoire de quinze chansons qui s’ouvrent par Camarade interprétée par la voix de velours de Marc Lavoine.
La Montagne ardéchoise prend des accents de Catalogne avec Cali. Il y a les ambiances pop-rock d’Aimer à perdre la raison revisitée par Mathias Malzieu, du groupe Dionysos. La femme est l’avenir de l’homme se fait sensuelle sous la voix de Julien Doré sur fond d’arrangements électro. Patrick Bruel chante de manière très émouvante Ma Môme. Catherine Deneuve et Benjamin Biolay offrent un duo sensible sur C’est beau la vie. Le timbre fragile de Raphaël fait mouche sur J’arrive où je suis étranger. Patrick Fiori donne du souffle à la bouleversante Que serais-je sans toi, tandis que Grégoire nous touche avec son interprétation tout en tendresse de Tu aurais pu vivre. Sanseverino, lui, met le feu sur Je ne suis qu’un cri. On retient ses larmes sur Nuit et Brouillard chantée par Hubert-Félix Thiéfaine et on serre les poings à l’écoute d’En groupe, en ligue, en procession interprétée avec fougue par Zebda.
La Québécoise Natasha St Pier est très bien sur Nous dormirons ensemble, ainsi que Patricia Petibon en duo solaire avec Marc Lavoine sur la Matinée. Un album qui se clôt par la vibrante Ma France chantée par Jean Ferrat, plus vivant que jamais.
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